Passionné tout à la fois par l’univers Marvel et les nouvelles technologies de la vidéo, Martin a trouvé dans Avengers : Power the Night un terrain de jeu au-delà de ses rêves les plus fous. Il nous raconte son expérience incroyable au sein de l’équipe créative du spectacle.
Martin, en quoi consiste ton travail à Disneyland Paris ?
Je m’occupe de la conception technique de nouvelles expériences. Ce peut être dans un théâtre en intérieur ou en extérieur, ou encore sur une parade. Les équipes artistiques ont l’idée, la vision, et mon rôle consiste à la transformer en un concept technique afin que la magie opère.
Comment en es-tu venu à occuper ce poste ?
Auparavant, j’ai beaucoup travaillé au Canada. J’ai commencé comme technicien vidéo, jusqu’à être en charge d’un département entier pour une grande société spécialisée dans l’événementiel. Je faisais beaucoup de mapping, mais aussi des congrès politiques, sportifs et des événements d’entreprise. Quand je suis revenu en France, je suis tombé sur une annonce de Disneyland Paris et je n’ai pas hésité. J’ai toujours été fan et rejoindre l’entreprise est comme un rêve devenu réalité. J’ai commencé il y a un peu plus de trois ans en tant que Régisseur vidéo Spectacle. J’avais en charge l’équipe des techniciens vidéo des parcs et je gérais la partie opérationnelle de nos différentes productions. J’ai notamment participé à Star Wars : La Célébration Galactique, qui reste un très grand souvenir. Et depuis mai 2022, je suis passé Concepteur Vidéo et Show Control pour la division Spectacles de Disneyland Paris.
Quel fut ton rôle sur Avengers : Power the Night ?
Mon rôle consistait à faire le lien entre les personnes qui ont développé les différents médias utilisés dans le spectacle et Arnaud, notre metteur en scène. Pour cela, nous nous sommes appuyés sur le système qui avait déjà fait ses preuves sur la saison Legends of the Force et que nous avons remis à jour avec les équipes de maintenance. Puis nous avons fait beaucoup de tests sur site pour qu’il y ait une véritable osmose entre la vidéo, les effets spéciaux, la lumière, les lasers et évidemment les drones. Tout cela à 4h du matin pour que cela reste une surprise jusqu’au soir de la Première !
À quel stade du projet es-tu arrivé ?
J’ai été impliqué très tôt, dès que le projet a été véritablement lancé et que le metteur en scène a présenté ses premières idées aux équipes de Marvel. De cette manière, j’ai pu suivre au plus près l’évolution des idées et voir ce qui était réalisable d’un point de vue technique. Sur Avengers : Power the Night, tout pouvait fonctionner dès le départ, ce qui a grandement facilité les choses.
Comment s’est passé le travail avec Arnaud ?
Nous avons essentiellement collaboré lors des tests sur place. Nos échanges se sont concentrés sur les mouvements des personnages et leur placement sur The Twilight Zone Tower of Terror. J’apportais mon expertise technique pour suggérer tel ou tel placement en fonction des différents effets souhaités. Il fallait aussi prendre en compte le fait qu’un spectateur qui va être complètement à droite ou à gauche de Production Courtyard n’aura pas du tout le même point de vue. Nous avons donc travaillé pour faire en sorte que tous les spectateurs puissent avoir une expérience optimale.
Comment se créent les vidéos du spectacle ?
Grâce au talent de nos équipes internes de motion design, qui ont l’habitude de travailler avec The Twilight Zone Tower of Terror. Ils ont un modèle 3D de l’attraction dans leurs machines et ils dessinent directement dessus. Ils m’ont donc livré un média prêt à être diffusé. J’ai assemblé le montage des médias dans nos serveurs vidéo et réalisé la programmation, les transitions d’ouvertures, les annonces de F.R.I.D.A.Y. et la fin du spectacle, mais l’essentiel était là.
Comment passe-t-on de la modélisation sur ordinateur aux tests grandeur nature ?
Sur un écran, un média peut rendre parfaitement bien, mais les tons ocres de The Twilight Zone Tower of Terror imposent déjà des ajustements au niveau des couleurs. De la même manière, certaines transitions peuvent fonctionner à l’écran, mais avec la pyrotechnie et les autres effets, on n’obtient plus forcément l’effet envisagé. C’est donc à moi d’ajuster en live, notamment au niveau du placement des personnages sur la tour, pour voir de quelle manière ils vont pouvoir tirer ou lancer des objets, ou encore quelle pyrotechnie utiliser pour que tout fonctionne en harmonie avec la vidéo.
Afin d’être encore plus efficaces, nous avions branché la machine de motion design directement sur notre système, comme on mettrait une caméra en live, et grâce à cela, le motion designer pouvait faire les modifications nécessaires directement durant les tests, ce qui a permis de gagner beaucoup de temps.
Quelle est la spécificité de la tour en tant que support ?
L’avantage, c’est qu’elle est très carrée, ce qui offre une belle surface à utiliser. En revanche, le défi, c’était de faire en sorte qu’elle puisse s’effacer au profit des personnages projetés. Il a donc fallu travailler les médias afin qu’on l’oublie pour mieux plonger le spectateur dans l’univers des Super Héros Marvel.
Comment avez-vous mis en place les interactions entre les différents médias ?
Le laser est un bon exemple. Dans beaucoup de tableaux, il vient épouser la vidéo et souligner certains mouvements comme le lancement des flèches. Il a donc fallu fournir des éléments vidéo en amont afin que le designer en charge de cet effet puisse travailler au plus près du visuel. Ce n’est qu’ensuite que l’on passe aux tests grandeur nature, afin de nous assurer que ce que nous avons imaginé dans nos têtes et sur nos ordinateurs fonctionne bien dans la réalité.
Comment avez-vous géré l’équilibre entre la vidéo et les drones ?
Avengers : Power the Night est un spectacle de drones. C’est d’eux que vient l’effet « Waouh » de cette expérience. Il faut donc faire en sorte, quand ils apparaissent, d’être le plus sobre possible côté vidéo, et notamment au niveau des mouvements. Durant ces moments, la vidéo va en quelque sorte s’effacer, pour ne pas attirer l’attention sur elle et permettre aux drones de s’exprimer. C’est un véritable ballet entre chaque discipline et chaque métier.
Quel fut le rôle de la musique dans la conception du spectacle ?
Elle est le chef d’orchestre du spectacle. Elle donne la durée et le rythme des différents moments. On dispose tous de la bande son, notamment les motions designers, et c’est elle qui permet de synchroniser tout le monde.
En quoi ton expérience opérationnelle nourrit ton travail actuel ?
Quand on imagine un spectacle, il faut aussi prendre en compte le fait qu’il va être joué tous les soirs, parfois plusieurs fois par soir, avec à chaque fois le même rendu et la même qualité. Il faut donc que les équipements tiennent et que les opérateurs soient à l’aise avec leur mode de fonctionnement. Avoir été dans l’opérationnel auparavant m’a permis de prendre en compte le spectacle dans sa réalité, et de travailler dans cet esprit afin d’avoir une expérience identique chaque soir.
Un spectacle de cette échelle, c’est en effet beaucoup de préparation au quotidien.
Cela demande énormément de vérifications chaque jour en amont. Pour ce qui est des techniciens qui opèrent en vidéo, ils arrivent 4 heures minimum avant le début du spectacle et ils ont tout une procédure à respecter pour vérifier chaque vidéoprojecteur et s’assurer que les media servers, les machines qui vont faire le mapping vidéo, fonctionnent correctement. Nous avons aussi toutes sortes de sécurités et de relais pour être sûrs, si un problème technique surgit, que le spectacle puisse être donné malgré tout dans les meilleures conditions.
La vidéo, cela représente combien de personnes ?
En termes de concepteurs vidéo, nous sommes deux. En revanche, l’équipe opérationnelle compte en ce moment une dizaine d’opérateurs. Leur nombre évolue en fonction des besoins et des événements. Quant aux équipes maintenance, elles sont très nombreuses dans la mesure où elles ont beaucoup d’équipements en charge. Cela représente une soixantaine de personnes environ.
Quels sont les défis que vous avez rencontrés pour mettre au point ce nouveau spectacle ?
Le principal défi tenait aux délais. Nous avons eu deux mois pour produire l’ensemble de ce spectacle, ce qui est très court. Il y a aussi la synchronisation entre tous les éléments. Je pense que nous n’avons jamais eu autant d’interactions à gérer, comme l’utilisation intégrée des lasers. Les drones ont été également conçus dans la continuité de la vidéo, comme au moment où Captain America lance son bouclier. La continuité se fait directement dans le ciel sur les drones, et c’est précisément ce qui rend ce spectacle unique et superbe.
Dans de telles conditions, le travail d’équipe est essentiel.
Je pense que cela a effectivement créé des liens entre nous. Nous avons des ressources incroyables en interne. Le fait de travailler directement entre collègues, sans passer par un studio externe, nous a permis de montrer ce dont nous étions capables ensemble. Cela a permis également de faire éclore de très belles idées et conduit à un très beau résultat.
Quel est ton moment préféré de ce spectacle ?
Étant un fan de Marvel, j’adore vraiment l’ensemble du spectacle. Mais si j’avais à choisir un moment en particulier, je dirais la séquence avec Vision. Il n’y a pas de drones. L’effet est basé sur le laser qui sort de son front et sur son décollage. Nous avons réussi à positionner le personnage sur la tour de telle sorte que le laser se retrouve exactement au bon endroit. Nous n’étions pas sûr de garder ce passage, mais au final, nous nous sommes rendu compte qu’il fonctionnait à merveille. Je suis ravi qu’il ait été conservé !
Je n’oublierai pas non plus la Première. Nous étions tous avec le public au milieu de Production Courtyard et j’ai été tout particulièrement ému par les réactions des enfants. Ils s’extasiaient en reconnaissant leurs héros préférés et riaient en voyant la Guêpe tournoyer ou encore Groot scratcher sur The Twilight Zone Tower of Terror ! C’est à ce moment qu’on sait que la magie opère vraiment !