Rencontre avec Nicolas Cueff, Concepteur Maquillage

Les maquillages sont une composante essentielle de la féérie des spectacles et parades de Disneyland Paris. Le Concepteur Maquillage Nicolas Cueff nous en dit plus sur son métier, ainsi que sur son travail dans le cadre du Festival Halloween Disney.

Comment es-tu devenu Concepteur Maquillage à Disneyland Paris ?

J’ai toujours rêvé de travailler dans le monde du spectacle. Après une double formation de coiffeur et de maquilleur, je me suis donc spécialisé dans la coiffure « studio ». A la fin de mes études, une de mes professeures, qui travaillait de temps en temps à Disneyland Paris, m’a suggéré de postuler, et trois semaines plus tard, je décrochais mon premier contrat ! C’était en 2004, et déjà pour Halloween ! Ce fut très impressionnant car pour nous, maquilleurs, c’est une saison particulièrement intense. Il y avait énormément d’artistes à coiffer et à maquiller. De plus, certains maquillages demandaient des prothèses et d’autres techniques très spécifiques. Heureusement, j’ai pu bénéficier de la bienveillance et des conseils de toute l’équipe. J’ai beaucoup appris pendant cette période.  J’ai passé plus de 10 ans au département Cosmétologie, durant lesquels j’ai coiffé et maquillé sur la plupart des spectacles et parades des Parcs. Puis, il y a trois ans, notre direction s’est dit qu’il serait intéressant de créer une cellule composée de designers spécialisés dans le maquillage et la coiffure, tout comme les costumes ou les décors, et c’est ainsi qu’est né le département Cosmétologie créative, où je travaille en tant que Concepteur Maquillage Coiffure Perruque. Nous avons ouvert ce département à deux, et maintenant nous sommes trois. Mon premier projet à ce poste fut Le Festival Pirates et Princesses, puis nous avons continué avec notamment Le Festival du Roi Lion et de la Jungle, qui est particulièrement riche en maquillages. 

En quoi consiste ton travail ?

Tout commence par le design d’un maquillage. Une fois qu’il a été validé, nous réalisons une fiche technique détaillée, indiquant les différents produits à utiliser pour chaque rôle et les endroits du visage où les appliquer, afin de servir de support aux maquilleuses et maquilleurs sur le terrain. Nous organisons des formations à leur intention afin qu’ils puissent s’entraîner et pleinement maîtriser chaque modèle. Cela nous aide également à déterminer les temps de maquillages qui seront nécessaires. Certains artistes peuvent se maquiller eux-mêmes. Il faut les former eux-aussi. Et une fois le spectacle lancé, nous accompagnons le travail des maquilleurs. Car le maquillage n’est pas une science exacte. On peut demander à deux personnes de faire la même chose sans jamais avoir le même résultat. Il faut donc nous assurer que le design original est bien respecté, et ce tout au long de la production. Enfin, un autre aspect de notre travail à mes collègues et moi-même consiste à évaluer et à passer les commandes de tous les produits de maquillage et perruques nécessaires pour les saisons et les spectacles.

Comment se passe la création d’un maquillage ?

Au départ, j’utilise toujours un papier et des crayons. J’ai toujours mes couleurs avec moi et j’ai souvent besoin de poser à plat les premières idées, que ce soit dans le choix des teintes ou leur disposition sur le visage. Puis très rapidement je m’entraîne sur visage humain car le travail sur les formes et les volumes m’inspire également beaucoup. Enfin, pour les fiches techniques, je travaille avec des infographistes afin de proposer des modèles les plus précis possible. 

Parmi mes sources d’inspiration, il y a très souvent les dessins-animés de Disney. Il y a aussi le Metteur en Scène, qui va m’expliquer ce qu’il souhaite : les couleurs qu’il a en tête, les matières qui seront utilisées pour les décors, etc. Tout cela me donne un aperçu de l’atmosphère qu’il y aura sur le spectacle. Et ensuite, je rencontre les designers costumes, pour préciser la manière dont le maquillage va s’intégrer dans l’ensemble de la tenue de l’artiste.

Quel est l’esprit du Festival Halloween Disney ?

Il y a plusieurs thèmes. D’un côté, l’automne, avec des tons marron, orangés, ou encore des teintes citrouille, et de l’autre la frayeur, marquée par des couleurs sombres. Ursula et ses murènes feront également quelques apparitions surprises, qui nous plongeront dans l’océan. C’est une palette très large.

Quelles sont les créations les plus emblématiques du Festival ?

Cette saison sera riche en surprises qui ne seront pas les mêmes d’une journée sur l’autre. Il faudra être prêt à tout, et garder les yeux grands ouverts ! Vous n’êtes pas à l’abri de tomber sur un char ou une animation étonnante, qui peuvent surgir à tout moment. 

Pour moi, l’une des créations emblématiques que j’ai imaginé il y a quelques années est le personnage que nous appelons « la Fille-Corbeau ». C’est un rôle très mystérieux, d’autant qu’elle est cachée dans un arbre. Elle est habillée dans des couleurs froides, notamment son chapeau en dentelle, ce qui fait que nous sommes partis sur du noir et du vert-kaki. 

Dans la mesure où son chapeau occupe le haut de son visage, le Metteur en scène m’a demandé de concevoir un maquillage original pour le bas. En m’inspirant à la fois du char et du costume, j’ai imaginé comme des racines qui monteraient sur le menton et la mâchoire.
 

Ce mélange d’animal et de végétal fait penser à un autre spectacle auquel vous avez participé, La Forêt de l’Enchantement : Une Aventure Musicale Disney. En quoi cette expérience a nourri votre travail sur le Festival Halloween Disney ?

La Forêt de l’Enchantement fut un projet particulièrement créatif qui m’a permis de développer de nombreuses techniques dont je me sers encore souvent aujourd’hui. C’était la première fois que j’avais autant de maquillages à créer, et sur autant de thèmes différents parmi lesquels la faune et la flore. Cette expérience m’a beaucoup aidé pour concevoir le maquillage de la Fille-Corbeau, dans la mesure où on retrouve ces deux éléments dans ce personnage dont le corps est un arbre, et la tête un corbeau posé sur cet arbre. D’où l’idée de faire en sorte que le bas du visage évoque des racines, tandis que le haut, avec le bec et le chapeau, représente l’animal. 


Tu citais les acolytes d’Ursula, qui l’accompagneront lors de ses apparitions surprises. Comment as-tu imaginé leur maquillage ?

Nous sommes partis de la couleur des costumes, qui évoquent l’océan, et nous avons imaginé un maquillage avec différents tons de bleu, et un jeu sur les ombres et les lumières. Nous avons également repris un peu du vert des murènes. Les Metteurs en Scène ont souvent des idées très précises sur l’histoire de chaque personnage. Pour les danseurs qui accompagnent les deux murènes, le mot d’ordre était d’oublier l’humain. Cela nous a donné envie de casser les lignes et de créer un maquillage qui déforme le visage, avec des yeux asymétriques. On a vraiment l’impression de créatures d’un autre monde. Pour nous, c’est formidable d’avoir autant de liberté ! 

Pour toi, qu’est-ce qu’un maquillage « Disney » ?

C’est vraiment un maquillage de scène. Il faut que tout soit « plus » ! On va être plus coloré, ou encore plus intense parce qu’il faut qu’il se voie de loin et qu’il reflète la personnalité du personnage. Le maquillage doit faire partie intégrante du spectacle et participer à l’émerveillement des spectateurs. C’est le contraire d’une émission télé ou de certains films pour lesquels il faut faire en sorte que le maquillage ne se voie pas. À Disneyland Paris, nous utilisons le maquillage comme un art à part entière, et nous le revendiquons en tant que tel !

Le Festival Halloween Disney est aussi un moment où nos visiteurs peuvent eux-aussi venir maquillés. Quelles sont les tendances de cette année ?

Dans la mesure où il faut porter un masque, je conseillerai de tout miser sur le regard ! Pour Halloween, avoir un regard souligné, c’est toujours très joli. Et l’eyeliner noir et le fumé noir sont toujours du plus bel effet !
 

Quels conseils donnerais-tu à celles et ceux qui rêvent de se lancer comme toi dans le maquillage professionnel ?

C’est un métier très technique qui s’apprend en école, mais aussi beaucoup sur le terrain. Il faut être très patient car cela prend du temps. Chaque visage est différent, et une technique qui fonctionne bien sur une personne ne fonctionnera pas forcément sur une autre. De plus, la mode change tout le temps. Il faut donc s’adapter en permanence. Mais aussi, il faut aimer les gens. On ne peut pas « juste » maquiller. Quand on maquille ou on coiffe quelqu’un, il y a toujours un lien qui se crée. Il faut savoir écouter et être de bon conseil tout en restant discret. Les maquilleurs qui ont fait les plus grandes carrières sont évidemment de très bons techniciens, mais ce sont aussi des gens qui ont su développer un grand sens des relations humaines. C’est aussi ce qui fait que j’adore mon métier !

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